Vous êtes ici : Accueil > Actualités > PRISE D’ACTE DE LA RUPTURE ET DEMISSION

PRISE D’ACTE DE LA RUPTURE ET DEMISSION

Le 31 août 2015
La démission et la prise d’acte de la rupture du contrat de travail constituent deux modes de rupture unilatérale du contrat de travail à l’initiative du salarié qui se distinguent cependant sur plusieurs points.


Afin de faire le meilleur choix entre ces deux modes de rupture, votre Avocat vous conseille et vous assiste dans votre décision.

La démission se définit comme un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.

Cette définition précise a été donnée par la chambre sociale de la Cour de cassation à l’issue d’un abondant contentieux ayant mis en évidence que l’initiative prise par le salarié de rompre son contrat de travail ne traduisait pas nécessairement de sa part une volonté réelle de mettre fin aux relations contractuelles.

En effet, une démission n’est valable qu’à la condition d’avoir été exprimée librement, c'est-à-dire en dehors de toute contrainte ou pression exercée par l’employeur, et de façon explicite, ce qui signifie que la volonté de démissionner ne peut se traduire du comportement du salarié (une absence injustifiée ou un abandon de poste ne suffit pas à l’employeur pour considérer que le salarié a démissionné).

La volonté de démissionner du salarié ne doit pas avoir été altérée par l’exercice d’une violence morale.

Par conséquent, un salarié qui a été contraint de démissionner, soit sous la pression de l’employeur, soit en raison d’une faute de celui-ci ou de ses conditions de travail, ne pourra pas être considéré comme ayant manifesté sa volonté libre et réfléchie de démissionner.

A ce titre, la chambre sociale de la Cour de cassation a eu l’occasion de préciser qu’il importe peu que le salarié n’ait assorti sa lettre de démission d’aucune réserve dès lors qu’il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission, qu’à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque. (Cass. Soc., 9 mai 2007 N° 05-40315)  

De la même manière, une démission donnée sous l’emprise de la colère, de l’émotion ou dans un état psychologique anormal ne manifeste pas une volonté claire et non équivoque de rupture et peut donc la priver d’effet.

Par conséquent, les démissions équivoques (c’est-à-dire qui ne procèdent pas de la volonté libre et éclairée du salarié) peuvent être dénoncées devant le Conseil de Prud’hommes par le salarié qui a été contraint, d’une manière ou d’une autre, de démissionner en vue de faire requalifier cette démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Cette requalification en licenciement se fait au préjudice de l’employeur et l’expose à toutes les conséquences d’un licenciement irrégulier en la forme et injustifié (versement de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement, de l’indemnité compensatrice de préavis, congés afférents, indemnité compensatrice de congés payés, dommages et intérêts, etc.).

S’agissant de la forme de la démission, aucune forme particulière n’est prévue par le Code du travail, de sorte qu’elle peut être écrite ou verbale.

Néanmoins, il est évidemment préférable de donner sa démission par écrit.

Celle-ci produira ses effets qu’elle soit remise au chef de service, au directeur du personnel, au supérieur hiérarchique, etc., peu important que le destinataire ait ou non reçu délégation de pouvoir du chef d’entreprise pour la recevoir.

La démission claire et non équivoque emporte rupture définitive du contrat de travail et n’a pas à être acceptée par l’employeur.

Pour être valable et produire tous ses effets,  elle n’a pas non plus à être motivée.


Sur ce point, lorsque le salarié motive sa démission par des manquements de l’employeur, la rupture s’analyse en une prise d’acte.

En effet, la prise d’acte de la rupture du contrat de travail est un mode de rupture du contrat par le biais duquel le salarié met un terme à son contrat en se fondant sur des griefs qu’il impute à son employeur.

La prise d’acte n’est soumise à aucun formalisme et peut valablement être présentée par votre Avocat. Elle doit toutefois être directement adressée à l’employeur.

Dans un premier temps, la prise d’acte entraîne cessation immédiate du contrat de travail et ne peut plus être rétractée.

Dans un second temps, la prise d’acte donne lieu à un contentieux judiciaire puisque le salarié va solliciter devant le Conseil de Prud’hommes la requalification de la rupture en licenciement aux torts de l’employeur.

Les conseillers auront ainsi à se prononcer sur la réalité des griefs reprochés par le salarié à l’employeur, de manière à pouvoir définitivement requalifier la prise d’acte en licenciement aux torts de l’employeur ou en démission.

Les conséquences de la prise d’acte diffèrent, en effet, selon que les griefs invoqués par le salarié sont fondés ou non.

Ainsi, si les griefs sont fondés, le Conseil de Prud’hommes requalifiera la prise d’acte en licenciement aux torts de l’employeur.

Si les griefs allégués par le salarié ne sont pas fondés, le Conseil de Prud’hommes requalifiera la prise d’acte en démission. 

Il convient de préciser qu’il appartient exclusivement au salarié d’établir les faits allégués à l’encontre de l’employeur.

Si le salarié ne parvient pas à établir la réalité de ses griefs, ou s’il subsiste un doute sur la réalité des faits invoqués à l’appui de sa prise d’acte, celle-ci doit produire les effets d’une démission.

A ce titre, il faut également souligner que pour apprécier le bien-fondé de la prise d’acte, les juges ne sont pas liés par les griefs énoncés dans la lettre qui la notifie.

Ainsi, le salarié peut faire valoir devant le Conseil de Prud’hommes d’autres manquements de l’employeur que ceux énoncés dans sa lettre de prise d’acte, à la condition toutefois de les établir et qu’ils soient antérieurs à la date où il a pris acte.

Par ailleurs et surtout, les manquements invoqués à l’encontre de l’employeur doivent être d’une gravité suffisante pour caractériser une rupture imputable à l’employeur.

Sur ce point, il est important de noter que la chambre sociale de la Cour de cassation est venue récemment préciser que le manquement suffisamment grave est celui qui empêche la poursuite du contrat de travail. (Cass. Soc., 26 mars 2014 N° 12-23634, N° 12-21372 et N° 12-35040 ; Cass. Soc., 12 juin 2014 N° 12-29063 et N° 13-11448)

Ainsi, la jurisprudence retient désormais comme critère d’appréciation pour faire droit à la prise d’acte de la rupture le manquement suffisamment grave qui empêche la poursuite du contrat de travail.

La chambre sociale a donc substitué au critère traditionnel fondé sur la gravité suffisante des manquements de l’employeur, un critère plus précis fondé sur les conséquences du manquement de l’employeur selon lequel la faute rend impossible le maintien du contrat de travail.

La prise d’acte de la rupture du contrat de travail n’est donc justifiée que si les manquements invoqués sont d’une gravité telle qu’ils empêchent la poursuite du contrat de travail. (Cass. Soc., 17 décembre 2014 N° 13-20703 ; Cass. Soc., 15 janvier 2015 N° 13-17374 ; Cass. Soc., 21 janvier 2015 N° 13-15764 ; Cass. Soc., 4 février 2015 N° 13-21729)

En conclusion, la prise d’acte demeure une initiative risquée de la part du salarié. Avant de décider de rompre votre contrat de travail par le biais d’une prise d’acte, mieux vaut recueillir les conseils de votre Avocat après lui avoir exposé votre situation.